Cela peut paraître étonnant mais acheter un tube de peinture (ou un godet pour l'aquarelle), ce n'est pas uniquement choisir une couleur. L'opacité, la qualité (fine, extra-fine, semi-fine), la permanence... auront beaucoup d'incidence sur le rendu final.
Mais encore faut-il comprendre de quoi il retourne.
Alors si vous vous êtes déjà retrouvé perplexe devant un rayon de tubes bigarrés, sans vendeur à l'horizon, prenez-le temps de lire cet article : 6 clés à connaître peuvent éviter quelques écueils.
Dans le tube, avant tout des pigments et un liant
Quelle que soit la technique utilisé, la coloration vient du pigment et la texture du liant.
Pour faire simple, ce qui différencie donc une acrylique, une huile d'une aquarelle, c'est la nature du liant. Et ce qui différencie deux couleurs, par exemple un bleu de cobalt et un bleu indigo, c'est la nature du pigment.
En ajoutant un diluant (par exemple l'essence de térébenthine pour la peinture à l'huile), on va pouvoir ajuster le viscosité et la tenue de la couleur.
En ajoutant des additifs, on va pouvoir créer des effets : ajouter de la matière et de la texture (charge), ajuster les effets de brillance, les durées de séchage, ajouter des composés iridescents ou métalliques...
Et, enfin en vernissant, on va protéger les pigments.
Il existe deux grandes familles de pigments :
- les pigments de synthèse, issus de procédés chimiques
- les pigments naturels, le plus souvent minéraux (les ocres et les terres notamment) mais parfois aussi organiques (l'indigo par exemple).
Clé n°1 : Qualité étude, fine, extra-fine
La quantité de pigment détermine la qualité de la peinture : une qualité étude sera moins chargée en pigment qu'une qualité fine, qui elle-même contiendra entre 1,5 à 2 fois moins de pigment qu'une qualité extra-fine.
La qualité étude est donc clairement plutôt à réserver aux expérimentations et... aux études. Un débutant aura par contre plutôt intérêt à se concentrer sur les couleurs primaires mais à investir dans une qualité fine ou extra-fine pour obtenir des couleurs saturées.
Clé n°2 : Durée de vie (permanence)
Chaque pigment a sa propre permanence dans le temps, à savoir une durée de vie qui lui est propre.
Il suffit d'observer une peinture ancienne dans un musée pour s'en rendre compte : la couleur est souvent très assombrie par l'effet de l'oxydation ou, à l'inverse, décolorée par l'exposition à la lumière.
Sur votre tube, cette indication vous est donnée par une série de +, d'étoile ou de A (chaque fabricant a sa codification).
Le vernis vient renforcer cette protection, en protégeant la peinture des UV, de la poussière et de pollution.
Clé n°3 : Le pouvoir couvrant du pigment
Chaque pigment a également son propre pouvoir couvrant : par exemple, la plupart des terres seront opaques quand le jaune d'auréoline sera transparent.
Cette indication est donnée, selon la marque, par le symbole T (pour transparent) / O (pour opaque) ou par une case vide (transparent), semi-vide (semi-opaque) ou pleine (opaque) comme sur la photo ci-dessous.
Cette information est essentielle et doit être exploitée en fonction de la technique utilisée :
- à l'aquarelle, technique de la transparence par essence, particulièrement, bien connaître à quelle catégorie appartient le tube utilisé vous permettra de maîtriser beaucoup plus rapidement vos effets
- à l'acrylique, bien repérer les couleurs transparentes permet de les réserver aux glacis... et d'éviter de s'acharner à passer plusieurs couches pour obtenir une couleur couvrante (sans succès).
Clé n°4 : Le ou les pigments présents dans le tube
Il existe des couleurs monopigmentaires , composées d'un seul pigment, et des couleurs composées d'un mélange de plusieurs pigments.
Cette indication figure sur la plupart des tubes, ou à défaut, pour les fabricants sérieux, dans les nuanciers de référence. C'est ce qui correspond au(x) code(s) composé(s) d'une ou deux lettres (les initiales de la couleur en anglais, par exemple, Br pour Brown) suivies d'un numéro (qui correspond à la référence précise du pigment dans l'International Color Index).
La désignation Imit ou Hue indique que la substance d'origine a été substitué et "imitée" : la plupart du temps, pour supprimer un composant dangereux mais se rapprocher au plus près du pigment originel (avec plus ou moins de bonheur).
Cette information peut être utile pour les mélanges : le résultat d'un mélange de couleurs monopigmentaires est plus facile à maîtriser qu'un mélange de couleurs composées de plusieurs pigments. C'est particulièrement vrai à l'aquarelle : je recommande donc vivement aux débutants de cibler des tubes ne comportant qu'une indication de pigment. A l'acrylique, la sensibilité est moindre (je ne pratique pas assez l'huile pour me prononcer).
Elle peut aussi vous servir si vous souhaitez retrouver une couleur équivalente à votre couleur favorite dans une autre marque : par exemple, vérifier qu'un magenta ou un rose correspond bien au rose primaire (PV19) ou à un de ses homologues directs (PV42 ou PR122).
Clé n°5 : Le nom sur le tube, c'est juste mémotechnique
En clair, le nom sur le tube, c'est avant tout un nom commercial : qui peut d'ailleurs être différent pour le même pigment et chez le même fabricant entre un tube acrylique et un tube aquarelle.
On retrouve ainsi des désignations qui reprennent le nom d'un pigment: phtalocyanine, cobalt, quinacridone, cadmium... D'autres, une appellation courante : terre de sienne, noir d'ivoire, .... Mais aussi le nom du fabricant (rouge Sennelier) ou de l'inventeur (Vert de Hooker).
Un même nom peut donc être utilisé pour des compositions pigmentaires différentes ... comme un même pigment peut porter, en fonction des marques, des appellations très différentes.
Donc, si vous voulez retrouver votre couleur favorite, retenez la marque, le nom de la gamme et le nom du tube.
Clé n°6 : Attention au terme Cadmium
Les rouges, les oranges, certains jaunes et bruns sont traditionnellement fabriqués à partir de pigments de cadmium. C'est d'ailleurs leur découverte dans les années 1820-1840 qui nous vaut la puissance de certaines toiles impressionnistes.
Le problème, c'est que ce pigment fait partie des métaux lourd et est désormais classifié comme substance cancérogène, reprotoxique et écotoxique.
En Europe, l'utilisation du cadmium est quasi totalement interdite dans la fabrication des peintures... sauf pour les peintures d'artiste et donc vos fournitures de beaux-arts.
Sous la pression des Etats-Unis, la plupart des grands fabricants ont néanmoins développé des mélanges alternatifs, portant l'intitulé Imit/Hue ou cadmium free.
Je ne saurai que trop vous conseiller de les privilégier, même s'ils sont aujourd'hui nettement plus chers.
Avec sou sans cadmium, vos peintures sont des composés chimiques. Quelques précautions d'usage peuvent donc limiter les risques pour votre santé et contribuer à protéger l'environnement (ça vaut aussi pour les peintures de décoration murale) :
- privilégier le sans cadmium
- limiter l'utilisation des solvants, diluants et additifs lorsque c'est possible. Même en peinture à l'huile, désormais il existe des alternatives diluables à l'eau (je n'ai pas testé).
- éviter de travailler au doigt
- éviter de lécher vos pinceaux, même après nettoyage
- si vous utilisez des aérosols, porter systématiquement un masque de protection respiratoire
- essuyez vos pinceaux et palettes avec un essuie-tout avant de nettoyer la palette à grande eau ou à l'essence
- éliminer les vieux tubes et excédents en filière spécialisée (et si possible aussi les papiers d'essuyage)
- aérez très souvent votre atelier
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